dimanche 6 décembre 2015

Il y a eu une nouvelle attaque terroriste. Je n'ai pas très bien compris de quoi il s'agissait.. d'un avion, j'en suis certaine, mais je n'ai pas cherché à savoir qui pourquoi comment. La seule chose importante est qu'il ait survécu. 

Quelque jours après une actrice parisienne est morte et je me suis dit que, pour gagner un peu d'argent facilement, je volerais son chat et le revendrais au plus offrant, mais ce que je ne savais pas c'est que c'était lui qui l'avait tuée, de ses propres mains. Je ne sais pas pourquoi, en tout cas il s'en vantait sans arrêt auprès de n'importe qui. Il faisait sans cesse des apéros dans un appartement miteux (le nôtre peut-être ?) dans lequel il faisait tout le temps gris. Il buvait, buvait et ne pouvait s’empêcher de parler d'elle. Pour qui l'écoutait trois secondes, il était évident que c'était lui qui l'avait tuée. Il avait du sang sur les mains. Moi je n'osais pas dire que j'avais volé son chat. D'ailleurs je faisais tous les efforts du monde pour le cacher, ou plutôt pour cacher le cadavre de la pauvre bête car elle était morte entre-temps. L'avais-je tuée moi-même, je n'en sais fichtrement rien.. En tout cas, son petit corps demeurait au fond d'un grand sac de voyage dans lequel se trouvait de nombreux vêtements. Au bout de combien de temps l'odeur finirait-elle par se faire remarquer ? Il fallait agir, je le savais mais je faisais tout pour ne pas être impliquée dans cette affaire, c'est-à-dire que je ne faisais rien... ou plutôt, je faisais tout, absolument tout pour ne pas me faire remarquer. Je me rendais invisible, je me faisais disparaître ce qui était d'autant plus facile que les gens ne me remarquent pas. Je suis la fille invisible, mais cette histoire risquait tout à coup de me démasquer et c'est ce que je voulais à tout prix éviter. Ma situation était terrible car je ne pouvais pas le dénoncer, je l'aimais trop pour cela et cela me serait retombé dessus d'une façon ou d'une autre mais je ne pouvais pas non plus rester sans rien faire et supporter ses blagues grotesques, je ne pouvais pas continuer à regarder ce morceau de doigt, arraché sur le cadavre, se balader de main en main lors des soirées... je ne pouvais pas supporter d'avoir à le toucher, à le tenir... Il symbolisait tout l'horreur du crime commis, crime dans lequel j'étais impliquée qu'on le veuille ou non. A cette époque, je n'avais aucune solution pour m'en sortir indemne ; dans tous les cas, j'étais coupable. 

Lui au contraire se faisait omniprésent, il prenait toute la place, physiquement et médiatiquement. Il jouait dans des pièces de théâtre, participait à des concerts qui rendait hommage à cette pauvre actrice, il répondait à des interviews. Un soir, je ne sais pas par quel hasard nous nous sommes retrouvés chez elle... et quelqu'un a mentionné l'absence du chat... Qui remarque l'absence d'un chat lorsque sa maîtresse a été sauvagement assassinée ? normalement personne. Mais cette nuit-là quelqu'un s'en est aperçu... Ce n'était qu'une remarque anodine "Tiens, on n'a pas vu le chat" mais je me suis sentie obligée de répondre, de briser le silence dans lequel je me murais pour dire qu'"il avait sans doute dû sortir". Pourquoi n'ai-je pas simplement ignoré cette question, je ne sais pas. De toute façon, personne n'a semblé prêter attention à cette conversation. Tout le monde buvait et nageait dans une euphorie bizarroïde à laquelle j'étais étrangère. Qu'avaient-ils ingurgité pour être dans cet état là ? 

Le temps passant, j'avais déménagé dans un quartier pauvre et plutôt tranquille semble-t-il. La vie parisienne était si loin maintenant. J'avais une bonne amie, peut-être était-ce ma petite copine, je ne sais pas... Elle était très enthousiaste, avait beaucoup de projets.. mais malheureusement notre quartier avait été touché par un tsunami. Il était maintenant désert, les gens ayant préféré trouver refuge dans un environnement moins dangereux. J'ai eu la chance de discuter avec le maire et de lui expliquer qu'il était nécessaire de construire des appartements au quatrième étage mais il ne voulait pas...

Il faut croire que l'affaire de l'actrice parisienne était bien loin derrière... Elle ne semblait pas avoir été résolue, mais les gens étaient passés à autre chose. Je ne me souviens pas avoir revu mon ex. Qu'est-il devenu ? c'est bien le dernier de mes soucis. Mon amie et moi allons faire des courses dans un immense supermarché... elle déborde d'énergie comme toujours. Moi je suis plus calme, plus lente, on ne me remarque pas tandis qu'elle monopolise l'attention avec ses grands yeux bleus et ses cheveux brindilles. Elle court à droite, à gauche, revient avec une montagne de produits dans les bras et me glorifie d'un grand sourire. Elle ne marche pas, elle vole. Elle n'est pas si belle pourtant  mais on lui donnerait instantanément le bon dieu sans confession. Enfin, c'est ce que vous feriez. Parce que moi je commence à la connaitre, et à déceler ce qui se cache sous tout cet amas de gentillesse et de bonne humeur. Elle n'est pas aussi gentille qu'il y parait mais vous ne le voyez pas car elle cache terriblement bien son jeu. Je ne sais pas comment, elle avait eu vent de toute l'histoire de l'actrice assassinée et elle était véritablement fascinée par ce meurtre sanglant. Elle savait que j'étais impliquée de près ou de loin dans cette affaire mais elle ne savait pas de quelle manière. Cela la passionnait, elle voulait à tout prix savoir.. et elle voulait tuer.

D'une quelconque manière, elle trouvait une forme de plaisir dans le meurtre, Avoir du sang sur les mains, savoir que l'on a fait quelque chose d'interdit l'excitait. Combien de personne avait-elle tuées avant de me rencontrer ? Combien en tuerait-elle encore ? Que pouvais-je faire pour empêcher ça ? Si je parlais, je sais très bien de quelle manière elle me réduirait au silence... et je tenais quand même assez à la vie pour savoir qu'il valait mieux ne rien dire. Alors je ne disais rien et j'écoutais tous ses projets. Croyez-moi ou non mais j'essayais de faire en sorte qu'ils mettent le plus de temps possible à se réaliser. Je faisais tout pour ralentir la course du temps, mais le gout du sang lui était devenu indispensable, elle y était accro... Je la soupçonne de ne pas m'avoir parlé de tout, de sorte que je ne pourrais vous dire où se cachent les corps ni combien ils sont.

Un jour, une enquêtrice est venue dans notre quartier, elle m'a posé des questions et voulait relever mes empreintes digitales ce que je voulais à tout prix éviter, vous comprenez surement pourquoi. J'ai fait de mon mieux pour être aimable avec elle, si bien qu'elle voulait partir sans mes empreintes. Mais était-ce bien raisonnable de la laisser partir ? Comme vous le savez, le quartier était désert... il n'y avait qu'elle et moi, personne ne pourrait nous surprendre. Alors j'ai commis l'impensable. Je voulais seulement me protéger..

A votre avis, combien de fois ai-je seulement voulu me protéger ? Et que vais-je faire maintenant que je sais que vous savez ? 

Je vais sourire, d'un sourire diabolique, c'est tout ce dont vous vous souviendrez. 
Vous auriez mieux fait de vous méfier des apparences, on n'est jamais vraiment qui on croit et l'on est jamais vraiment qui on est.

Aucun commentaire: